La santé est plus qu’une simple « absence de maladie ». Dans bien des cultures, améliorer la santé signifie autre chose que de seulement combattre des agents pathogènes. On comprendra donc que la recherche sur le VIH auprès de diverses populations, y compris des populations autochtones du Canada, doit aussi tenir compte de définitions de la santé qui varient selon les contextes sociaux et culturels.
Visualiser la santé II (CTN 302) relève ce défi avec une recherche interventionnelle à l’intention des femmes autochtones séropositives, qui est culturellement enracinée et guidée par les arts. Charlotte Loppie, Renée Masching, Doris Peltier et Tracey Prentice dirigent l’équipe de recherche.
« Jusqu’à il y a quelques années, toute l’expérience de la recherche se concentrait réellement sur la maladie », explique Doris Peltier, chercheure en milieu communautaire et coordonnatrice nationale du projet. « Dans notre communauté, nous en sommes venus à croire que ce modèle axé sur la pathologie ne nous représentait pas. J’étais dérangée à l’idée d’être définie en termes de ‘facteur de risque’ et de ‘surreprésentativité’. Mais c’est la façon dont la recherche présentait les femmes autochtones. Cela a fait réagir notre communauté. »
Visualiser la santé II s’appuie sur la thèse de doctorat de Tracey Prentice, Visualiser la santé I, qui, entre autres observations, a constaté que le processus visant à faire participer les femmes autochtones séropositives à des interventions culturellement enracinées et guidées par les arts, était en soi positif pour la santé. Le second projet tentera d’utiliser le processus, les activités et le savoir autochtones mis à contribution dans le projet Visualiser la santé I en tant qu’intervention pour promouvoir la santé axée sur l’optimisation du bien-être des femmes autochtones séropositives au Canada.
« Nous avons conçu le projet Visualiser la santé comme une façon de donner aux femmes autochtones séropositives un espace et une occasion de raconter leur histoire et de mettre en valeur leur force et leur santé, plutôt qu’un récit typique tournant autour de la maladie, des traumatismes, des obstacles, des lacunes et des besoins sur lesquels elles étaient interrogées », ajoute Mme Prentice.
L’intervention en soi s’attarde à deux grandes questions : premièrement, que signifie la santé et quels liens les femmes autochtones séropositives établissent-elles entre la santé, le fait d’être femme et d’être de culture autochtone? Deuxièmement, comment le processus Visualiser la santé influe-t-il sur la définition qu’elles se font de la santé? Pour répondre à ces questions, l’équipe utilise des méthodes de recherche participative culturellement enracinées et basées dans la communauté et une structure de recherche « nichée », par laquelle une étude descriptive est intégrée à une étude interventionnelle.
Plus spécifiquement, dans sept sites canadiens, des participantes autochtones séropositives seront invitées à réfléchir aux questions de recherche et à y répondre en utilisant divers médias, traditionnels et liés à l’art contemporain, et à partager leur travail et leurs réflexions dans une série de « cercles de partage », une méthode de recherche qualitative autochtone.
L’impact de l’intervention sera mesuré et analysé par les investigatrices en conjonction avec les participantes par le biais d’instruments d’évaluation et de classification élaborés en collaboration.
Les équipes espèrent générer de nouvelles connaissances pertinentes pour les programmes et politiques à l’intention des personnes autochtones qui soient axés sur leur santé et leurs forces. En outre, en étudiant aussi l’impact de l’intervention elle-même, Visualiser la santé II a le potentiel d’éclairer les programmes de promotion de la santé pour les communautés autochtones en général et non seulement pour les femmes vivant avec le VIH.